Tinariwan « Aman Iman » Water is Life
L’éloge du Sahara
Ô toi qui prends la défense des habitants de la ville
Et qui condamne l’amour bédouin
Pour ses horizons sans limites,
Est-ce la légèreté que tu reproches à nos tentes ?
N’as-tu d’éloges que pour des maisons de pierre et de boue ?
Si tu avais les secrets du désert
Si tu t’étais éveillé au milieu du Sahara
Si tes pieds avaient foulé ce tapis de sable
Parsemé de fleurs semblables à des perles,
Tu aurais admiré nos plantes,
L’étrange variété de leurs teintes,
Leur grâce, leur parfum délicieux.
Tu aurais respiré ce souffle embaumé
Qui double la vie,
Car il n’a point passé sur
L’impureté des villes…
L’Emir Abdel Kader El Djazaïri
Toutes choses
Proches ou lointaines,
Secrètement
Sont reliées les unes aux autres,
Et vous ne pouvez toucher une fleur
Sans déranger une étoile.
Francis Thomson
Valentina Ghanem Pavlovskaya, Symphonie du désert, Gardienne des traditions, Instituto Italiano di Cultura Algeri
La caravane
La caravane passe
Entourée d’une cadence,
D’un silence,
D’un rythme sans écho.
Cherchant des sources des coteaux
Comme sur les mers, sans routes, les bateaux.
Sur la page blanche du désert
Où la lumière fond comme le plomb sur la flamme,
Les gazelles regardent de leurs yeux de femme.
La caravane passe
Liant les pays et les races,
Laissant sous leurs pas
Des mesures égales.
Le soleil est blanc, un morceau de cristal
Escortée par des ombres vives et berçantes,
Pensant à la nuit aux fraîcheurs caressantes
La vie a le rythme du pas des chameaux.
Tel un ciel hivernal par ses astres, les hameaux.
Des visages maigres et des regards sombres,
Leurs nuits sont longues et leur fatigue brève,
Cultivant la lumière et récoltant l’ombre.
Ils consolent leur espoir sur l’oreiller du rêve.
Bedir-Khan
Ce qui embellit le désert c’est qu’il cache un puits quelque part
Antoine de Saint-Exupéry
Valentina Ghanem Pavlovskaya, Symphonie du désert, Algérie 360 centerblog
Rhoufi des Aurès
Oasis de mon premier mot
Fleur immaculée dans la féerie de mes yeux
Galets poncés s’échappant de la terre
Rhoufi où toute angoisse semble proscrite
Vaisseau-mirage de fraîcheur et de bien-être
Sur l’oued sans âge
Rhoufi la somptueuse
Rires tièdes sur les géodes et les gypses
Touffes de drin au pied des palmiers aériens
Lauriers-roses dans le jaillissement des eucalyptus
Enfants au regard vif, empressés comme des gazelles
Le temps ne compte plus
Et ne vivent que le calme et la douceur
Le désert englouti sous une peuplade d’étoiles
Sur la vie d’une indicible paix
A la perfection de ciel et de la terre.
A la chute brutale du soir
Rhoufi pleure sous la lune diffuse
Et s’enfonce vers le sommeil
Majestueux des bendirs.
Djamel Amrani
Si tu chantes la beauté, même dans la solitude du désert, tu trouveras une oreille attentive
Khalil Gibran
Valentina Ghanem Pavlovskaya, Symphonie du désert, vinyculture.com
Désert
Alors apparaissent les choses belles et mystérieuses. Des choses qu’elle n’a jamais vu ailleurs, qui la troublent et l’inquiètent. Elle voit l’étendue du sable couleur d’or et de soufre, immense, pareille à la mer, aux grandes vagues immobiles. Sur cette étendue de sable, il n’y a personne, pas un arbre, pas une herbe, rien que les ombres des dunes qui s’allongent, qui se touchent, qui font des lacs au crépuscule. Ici, tout est semblable, et c’est comme si elle était ici, puis plus loin, là où son regard se pose au hasard, puis ailleurs encore, tout près de la limite entre la terre et le ciel. Les dunes bougent sous son regard, lentement, écartant leurs doigts de sable. Il y a des ruisseaux d’or qui coulent sur place, au fond des vallées torrides. Il y a des vaguelettes dures, cuites par la chaleur terrible du soleil, et de grandes plages blanches à la courbe parfaite, immobiles devant la mer de sable rouge. La lumière rutile et ruisselle de toutes parts, la lumière qui naît de tous les côtés à la fois, la lumière de la terre, du ciel et du soleil. Dans le ciel, il n’y a pas de fin. Rien que la brume sèche qui ondoie près de l’horizon, en brisant des reflets, en dansant comme herbes de lumière – et la poussière ocre et rose qui vibre dans le vent froid, qui monte vers le centre du ciel.
Valentina Ghanem Pavlovskaya, Symphonie du désert, behance
Tout cela est étrange et lointain, et pourtant cela semble familier. Lalla voit devant elle avec les yeux d’un autre, le grand désert où resplendit la lumière. Elle sent sur sa peau le souffle du vent du sud, qui élève les nuées de sable, elle sent sous ses pieds nus le sable brûlant des dunes. Elle sent surtout au-dessus d’elle, l’immensité du ciel vide, du ciel sans ombre où brille le soleil pur.
Alors, pendant longtemps, elle cesse d’être elle-même ; elle devient quelqu’un d’autre, de lointain, d’oublié. Elle voit d’autres formes, des silhouettes d’enfants, des hommes, des femmes, des chameaux, des troupeaux de chèvres ; elle voit la forme d’une ville, un palais de pierre et d’argile, des remparts de boue d’où sortent des troupes de guerriers. Elle voit cela, car ce n’est pas un rêve, mais le souvenir d’une autre mémoire dans laquelle elle est entrée sans le savoir. Elle entend le bruit des voix d’hommes, les chants des femmes, la musique, et peut-être qu’elle danse elle-même, en tournant sur elle-même, en frappant la terre avec le bout de ses pieds nus et ses talons, en faisant résonner les bracelets de cuivre et les lourds colliers
Puis, d’un seul coup, comme dans un souffle de vent, tout s’en va. C’est simplement le regard d’Es Ser qui la quitte, qui se détourne du plateau de pierre blanche. Alors Lalla retrouve son propre regard, elle ressent à nouveau son cœur, ses poumons, sa peau. Elle perçoit chaque regard, chaque pierre, chaque cassure, chaque dessin minuscule dans la poussière.
Elle retourne en arrière. Elle redescend vers le lit du torrent asséché, en faisant attention aux pierres coupantes et aux buissons d’épines. Quand elle arrive en bas, elle est très fatiguée, par toute cette lumière, par le vide du vent qui ne cesse jamais. Lentement, elle marche sur les chemins de sable jusqu’à la Cité, où les ombres des hommes et des femmes bougent encore. Elle va jusquà l’eau de la fontaine, et elle baigne son visage et ses mains, à genoux par terre, comme si elle revenait d’un long voyage. J.M.G. Le Clézio
J’ai toujours aimé le désert. On s’assoit sur une dune de sable. On ne voit rien. On n’entend rien. Et cependant quelque chose rayonne en silence.
Antoine de Saint-Exupéry
Valentina Ghanem Pavlovskaya, Symphonie du désert, behance
Terre des hommes
Que savons-nous, sinon qu’il est des conditions inconnues qui nous fertilisent ? Où loge la vérité de l’homme ? La vérité, ce n’est point ce qui se démontre. Si dans ce terrain, et non dans un autre, les orangers développent de solides racines et se chargent de fruits, ce terrain-là c’est la vérité des orangers. Si cette religion, si cette culture, si cette échelle des valeurs, si cette forme d’activité et non telles autres, favorisent dans l’homme cette plénitude, délivrent en lui un grand seigneur qui s’ignorait, c’est que cette échelle des valeurs, cette culture, cette forme d’activité, sont la vérité de l’homme. La logique ? Qu’elle se débrouille pour rendre compte de la vie. » Antoine de Saint-Exupéry
Ce qui sauve, c’est de faire un pas. Encore un pas. C’est toujours le même pas que l’on recommence.
Antoine de Saint-Exupéry
Farid Ladjimi, Touareg l’Homme bleu
Valentina Ghanem Pavlovskaya
Née en Ukraine au sein d’une famille d’artistes, Valentina Ghanem Pavlovskaya vit et travaille en Algérie. Après le diplôme de l’Ecole des beaux-arts de Grekov d’Odessa, Valentina Pavlovskaya enseigne (1977-1980) le dessin d’art et la composition à l’Ecole des beaux-arts que dirige son père. En 1981, elle arrive en Algérie. Depuis 1986, elle compte à son actif une cinquantaine d’expositions collectives et individuelles en Algérie et à l’étranger. Elle a aussi réalisé les fresques de Bains Romains de Zéralda et de Raïs Hamidou.
Valentina Pavlovskaya, Symphonie du désert, Liberté Algérie
Dans le domaine de l’édition, elle a illustré les livres de Malika Greffou Septième couleur, Ami pour la vie et L’anniversaire. Valentina Ghanem est lauréate du Grand Prix de la peinture du gouvernorat du Grand Alger (1999) et du concours international, organisé par le Natural World Museum de San Fransisco (USA). Ses tableaux figurent dans de nombreuses collections privées en Algérie et dans le monde. (Le soir d’Algérie)
Un projet lui tenait à cœur « l’ouverture d’une Galerie d’art ». C’est ce qu’elle fait en inaugurant « Sirius galerie d’art » en novembre 2014. L’espace est beau et accueillant, ouvert à l’art, aux artistes et au public. Et comme un clin d’œil de sa part à la ville de ses amours, ce sont ses œuvres qui sont exposées à l’ouverture officielle de Sirius. « Reflets d’Alger » de Valentina Ghanem Pavlovskaïa.
Valentina Ghanem Pavlovskaya, facebook
Depuis, la galerie ne désemplit pas. Les expositions s’enchaînent à un rythme effréné, « malgré, la difficulté du financement ». Il y a eu : « Exposition collective Trio » Rachid Nacib, Valentina Ghanem et Rachid Djemai. « Symphonie du Désert » de Valentina Ghanem Pavlovskaïa. « L’exposition d’Automne » de Bourdine Moussa. « Purification » de Karim Sergoua. « Quatiorque » de Abdelkader Belkhorissat, Karim Sergoua, Valentina Ghanem Pavlovskaïa et Rachid Djemai. « Un conscient » de Mizo. « SIROCCO » de Valentina Ghanem Pavlovskaïa. « Haik vibes » d’Alexandra Gillet. « L’été 2016 » exposition collective des 7 artistes de la galerie, et « Palettes différentes » regroupant 8 artistes. Avant la fin de l’année 2016, Valentina a programmé « Récital poétique » d’Abderrahmane Djelfaoui, Hommage à Anna Grèki, et la belle exposition de Mammeri Azwaw, le doyen de la peinture algérienne, qui a offert au public « Hors du ton ». (www.founoune.com)